Each design is a manifesto for the future
Par Thorsten Jonas

Le design comme levier écologique
Le propos présenté par Thorsten Jonas est que chaque choix de design façonne notre futur. Il le fait d’abord depuis l’angle de la crise climatique, en alertant sur l’énorme empreinte carbone du numérique, souvent sous-estimée (jusqu’à 90 % des données digitales ne sont jamais utilisées, tandis que 80 % des émissions sont fixées dès la phase de conception). Designers et ingénieurs ont donc une responsabilité capitale.
Pour illustrer son propos, il nous soumet des cas concrets :
- À l’Université de Copenhague, une vidéo décorative génère 5 gr de CO2 par visite, un impact inutile, mais récurrent.
- Le site allemand Otto pourrait réduire son impact en adaptant ses choix de conception.
Il met en avant l’importance des décisions de design qui influencent aussi les comportements utilisateurs, citant des exemples plus ou moins vertueux, comme Amazon, qui pourrait rendre le choix de livraison en point relais, plus écologique, l’option par défaut, ou Patagonia, qui affiche clairement les filtres pour les options plus durables.
Le design comme levier d’inclusion
Il souligne aussi à quel point le design par les personas tels que conçus habituellement peut être excluant : il cite l’exemple de Moia, service de covoiturage électrique de Volkswagen, prend en compte les stéréotypes d’utilisateurs, mais a longtemps ignoré les personnes en fauteuil roulant ou malvoyantes. Thorsten invite à repenser la conception du point de vue des exclus plutôt que des utilisateurs types : une inversion essentielle pour atteindre le but de l’inclusivité.
Au-delà du simple « user-centered design », il plaide pour un design centré sur l’humanité tout entière et sur l’environnement, en gardant à l’esprit que “l’utilisateur est seulement une partie du système”. Parmi les exemples de suggestions concrètes qu’il donne, nous citons l’intégration dans les user journeys des “sustainability layers” : les impacts sur les travailleurs derrière les services (Uber Eats, Amazon…), sur les communautés locales (Airbnb) ou sur la planète.
Les dérives du numérique actuel
Enfin, il évoque les paradoxes et dérives du numérique actuel : il nous rappelle comment chaque requête à l’IA génère un coût environnemental conséquent, souvent ignoré – 231 requêtes à ChatGPT émettent 1 kg de CO2 et 1 kg de CO2 coûte 15 kg de glace – et s’attarde sur la question éthique de l’appropriation culturelle ou artistique nécessaire pour entraîner les IA : comment on prend en compte le consentement des artistes dont les ouvrages permettent à l’IA de s’entraîner ? En somme, le designer a toujours le devoir moral de se demander à quel prix il résout les problèmes qu’il traite.
Ce que nous retenons
On assiste à une conférence qui a le mérite d’aborder “LEle” sujet brûlant et la qualifier d’ “engageante et inspirante” semble réducteur, surtout comparé à l’ensemble des conférences de la journée. La présence scénique de Thurston est magnétique et la cause qu’il défend est essentielle.
Le discours reste globalement dans un registre un peu prévisible, voire moralisateur. Quelques exemples concrets sont cités, mais l’ensemble manque de pistes opérationnelles réellement innovantes : le constat est frappant, mais les solutions restent largement vagues, recyclant un discours déjà entendu sur le design durable et inclusif.
On a manqué d’un peu plus de “comment faire” : après un passage en altitude, par des concepts et des principes remarquables, on aurait voulu redescendre “sur Terre” avec des méthodologies précises, des outils, ou des retours d’expérience approfondis.
De plus, la charge contre la tech et l’IA sonne un peu creuse, sans perspectives constructives : on finit par avoir l’impression d’un discours bienveillant, mais convenu, qui fait frissonner sans vraiment bousculer.
Autrement dit, cette conférence pose des questions incontournables, mais laisse le spectateur un peu frustré quand il s’agit de passer à l’action concrète et mesurable. En 2025, ça commence à faire léger.
L’héritage de Walt Disney : le design au service de l’expérience
Par Laura Almeida
Lire la démarche de conception d’expérience à l’aune de la vision portée par Walt Disney, notamment à la création de l’univers Disney, voilà l’ambition de cette conférence. Face à un auditoire habillé de paires d’oreilles de Mickey distribuées par les équipes FLUPA, de grandes thématiques autour de la culture de l’innovation dans l’expérience sont développées.
La conférence s’attache à montrer que, bien avant l’apparition des termes “UX”, “design produit” ou même “design d’interaction”, l’approche de Disney posait déjà les bases d’une pensée centrée sur l’utilisateur. De l’animation aux parcs à thème, l’ensemble de son œuvre est ainsi traversé par une logique d’expérience intégrée, visant à susciter engagement, immersion et émotion.
Laura aborde par exemple le rôle des Imagineers, ces profils créatifs et techniques qui auront participé très activement à la création des dispositifs des parcs d’attraction, et donc des expériences visiteurs associées (pour ceux intéressés par le sujet, une série documentaire plongeait dans leur univers).
Les principes d’animation, et par extension de motion design, destinés à reproduire une mécanique physique crédible et satisfaisante pour le spectateur sont également évoqués.
Des passerelles sont tracées entre la pratique historique de réutilisation d’assets dans l’animation traditionnelle et les logiques contemporaines de conception frugale ou encore de réemployabilité (et donc de logique de design patterns/composants/design system) ; la scénarisation émotionnelle est vue comme une forme de design centré sur l’engagement du spectateur ; la manière dont les parcs fonctionnent comme des espaces d’expérimentation grandeur nature est présentée comme une forme de prototypage itératif avant l’heure.
L’évocation du modèle Disney reste largement enthousiaste, sans réelle prise de recul sur les aspects plus controversés (nous y reviendrons) : entre autres, impact environnemental des parcs d’attraction et d’une franchise mondiale, standardisation culturelle, logiques d’optimisation commerciale.
Ce que nous retenons
L’exercice, qui aura conquis une bonne partie des spectateurs, preuve de sa qualité, nous laisse pourtant un sentiment ambivalent. Difficile d’être trop ouvertement critique, l’ensemble est rythmé et incarné, Laura confiant sa tendresse personnelle pour cet univers remontant à l’enfance.
Pour autant, le résultat est essentiellement une synthèse des parallèles que l’on voit depuis des années sur les réseaux sociaux entre Disney et le design sous toutes ses formes. La conférence compile des idées et comparaisons déjà bien connues, sans vraiment les questionner ni leur opposer de contrepoints. Les exemples mentionnés (motion design, design émotionnel, stratégie transmédia) restent survolés, sans analyse approfondie ou mise en tension. L’agrégation n’est pas inintéressante, mais il manque un angle de lecture personnel, une perspective qu’on n’aurait pas déjà lue de nombreuses fois sur les réseaux.
Une autre réserve concerne la réflexion “éthique” associée au sujet, et les échanges en questions/réponses n’auront pas levé le léger sentiment de malaise. Au cours de cet événement, dont la thématique était la transmission, et où la question des valeurs que peuvent (doivent ?) défendre les designers dans l’exercice de leur métier a été centrale, soulignée avec vigueur par Thorsten Jonas juste avant par ailleurs, le propos et la démarche de la conférence nous ont semblé un peu décalés. Il nous semble intéressant de nous interroger sur la possibilité de délivrer des expériences mémorables, sans y sacrifier peut-être les questions environnementales et éthiques. Mais ce sont des réflexions qui nous appartiennent, pas une leçon de morale.
Le génératif va-t-il remplacer le maître d’apprentissage ?
Par Jonathan Lalanne

À travers différentes réflexions, expériences et analyses, Jonathan questionne le génératif associé à l’IA et son impact sur l’apprentissage.
Avec un début de présentation assez compliqué à assimiler autour de l’expérimentation et de l’art, on a du mal à savoir où le discours souhaite aller et ce que l’on doit en tirer.
Par la suite, la démonstration autour de la courbe d’apprentissage est très pertinente et fait sens avec la mise en avant de 3 zones “Zone d’accélération”, “Zone critique” et “Zone d’expertise profonde” et la comparaison entre l’apprentissage “traditionnel” et l’apprentissage “accéléré”.
Le sujet abordé en suivant est la mutation profonde du modèle de transmission. A travers une comparaison d’une transmission traditionnelle et d’une transmission générative, Jonathan décrit le changement de la place du senior par l’IA générative et que celui-ci entraine des changements. Le temps long vers le temps court, la transmission linéaire vers la transmission non-linéaire.
Il met en lumière le fait que l’IA génère sans réelle compréhension. Et que par conséquent, les résultats proposés sont :
- sans intention créative
- sans contexte culturel
- sans sensibilité émotionnelle
Ainsi, l’apprentissage via IA générative permet un boost dans sa courbe, mais se révèle superficielle. Jonathan utilise alors cette citation “Plus les outils génératifs deviendront performants, plus le risque de compréhension superficielle augmentera” pour illustrer son propos.
Il indique également que l’on se dirige vers une homogénéisation des résultats via les biais d’entrainement, les techniques d’optimisation, la normalisation et la convergence des modèles. Et décrit que le rôle du designer gravite autour de trois piliers, “Sensibilité humaine”, “Logique des algorithmes” et “Complexité des algorithmes”.
Ce que nous retenons
En résumé, Jonathan délivre des études intéressantes sur la place de l’IA générative dans l’apprentissage et autour du rôle de designer. Il avance les limites de l’IA quant à un la superficialité qu’elle apporte malgré une courbe d’apprentissage accélérée et la normalisation des résultats qu’elle produit. Même si toutes ces réflexions mériteraient des études pour mesurer l’impact de façon plus scientifique et une revue du graphique de la courbe d’apprentissage pour illustrer la qualité d’enseignement. La présentation est une bonne mise en garde sur l’usage de l’IA et comment se former pour garder les avantages précieux que l’humain est capable de transmettre pour garder une créativité et une sensibilité
Se rencontrer au milieu du pont : et si le design s’appliquait à repenser l’inclusion en entreprise
Par Zalihata Ahamada Lafeuille
Pendant cet interlude, loin des problématiques produits, ou des « jumeaux numériques », Zalihata nous invite à une réflexion plus intime et sociétale. Elle y partage son expérience personnelle en tant que femme neurodivergente , aux origines modestes, qui tout du long de sa carrière aura dû s’adapter à un monde qui ne l’encourageait pas à être elle-même.
C’est d’ailleurs avec une question simple et percutante qu’elle ouvre sa conférence :
« Vous êtes-vous déjà senti différent ? »
Que ce soit en raison de nos origines, notre genre, notre statut social, nos revenus, ou de notre fonctionnement cognitif, nos différences influencent profondément notre façon d’être et d’agir dans un cadre professionnel.
Zalihata insiste sur le fait que ces différences, souvent invisibles, ne sont pas toujours comprises — et encore moins prises en compte — dans les environnements de travail actuels.
Et si, au lieu de toujours devoir nous adapter, employés et entreprises faisaient chacun un pas l’un vers l’autre ?
Un sujet personnel
Pour explorer ce vaste sujet qui peut occasionnellement générer un certain malaise, voire des désaccords, la conférencière prend le parti d’expliquer son propos à travers sa propre histoire. Diagnostiquée tardivement avec un trouble de l’attention (TDAH), un haut potentiel intellectuel (HPI), et cumulant parfois deux boulots pour joindre les deux bouts, elle évoque sa difficulté à s’acclimater dans le monde du travail. Ce décalage, mal interprété par son entourage professionnel, lui a souvent demandé une adaptation constante.
Elle questionne donc le mythe de la méritocratie. Pour elle, sans la reconnaissance de ces différences, ni remise en question des rapports de pouvoir, les plus vulnérables restent exclus. Pour changer cela ? Mettre en avant des programmes d’insertions plus justes et pensés avec et pour les personnes concernées.
La diversité au service du design
Zalihata nous encourage à nous entourer de profils variés, pour enrichir nos produits ainsi que limiter les biais et les stéréotypes. Pour appuyer son point, elle utilise un exemple particulièrement parlant. Il nous est présenté deux visuels générés à l’aide de Midjourney.
- Le premier, suit le prompt “génère une image de mariage”. Nous découvrons l’image d’un couple heureux à la sortie de l’église. Jusqu’ici, rien de troublant.
- Le deuxième, suit le prompt “génère une image de mariage en banlieue”. Nous découvrons alors un couple triste, qui marche la tête basse dans un décor désolant.
“Accueillir une diversité de profils dans nos équipes c’est apprendre à se débarrasser de ces clichés. C’est aussi ouvrir nos perspectives, affiner notre regard produit, et concevoir des solutions plus justes, représentatives et inclusives.”
Ce que nous retenons
La conférence fait mouche, pour preuve, les nombreux participants qui se prêtent au jeu lorsque l’oratrice nous laisse participer à une série de sondage rapide. Il est intéressant (voire essentiel) d’aborder le sujet par le biais d’une histoire personnelle. Ces différences peuvent être débattues, mais son ressenti, personne ne peut le contester.
Toutefois, bien que la présentation réussisse à sensibiliser, il nous aura peut-être manqué des solutions pratiques, des retours concrets, sur le déploiement de cette vision. L’intervenante aura bien cité rapidement des exercices, mais en définitive nous repartons sans réelles idées de comment intégrer ce nouveau regard.
Des nains sur les épaules des géants : comprendre hier pour designer notre métier demain
Par Antoine Voland-Logerais

À travers un voyage dans le temps présentant plusieurs étapes clefs de l’Histoire et du design, Antoine trace des parallèles pour parler de l’impact des innovations sur nos métiers et le monde du travail. Il questionne en suivant la place de l’IA et quels comportements adopter pour trouver sa place dans un environnement où la taille des équipes est réduite et où les rôles évoluent sans cesse.
Quatre comparaisons sont réalisées :
- Tout comme internet, l’IA n’est pas un outil, mais une prothèse, une augmentation du designer, dans la logique défendue par le sociologue McLuhan. Une démo d’un processus de design avec IA réalisé chez Accor est réalisée. Celle-ci illustre une connexion entre sources de données (analytiques et comportementales), maquettes Figma et IA afin d’automatiser le processus d’optimisation d’écran selon les retours utilisateurs et le design system centralisés. L’enjeu sera peut-être de sortir du piège de la technicité et élargir le périmètre data, IA, stratégie, plutôt que de rester des “faiseurs d’écrans”.
- Tout comme le pari raté de l’Armée française sur son choix de motorisation de tank pendant la 2ᵉ Guerre Mondiale, l’atout ne réside pas dans la technologie elle-même, mais dans son intégration dans les chaines de valeur. Considérer que l’IA permettra simplement d’aller plus vite, c’est louper l’impact organisationnel que ça va avoir : équipe plus petite, hybridation des rôles, workflows.
- La révolte des Canuts est l’illustration d’un monde professionnel qui essaie de lutter contre une industrialisation inéluctable : l’IA va pousser l’automatisation plus loin, et donc cela va créer une forme d’uniformisation, plus encore qu’actuellement avec tous les processus de création existants. Les designers doivent faire valoir trois atouts : créativité, culture transversale et capacité à collaborer pour innover
- Depuis les tablettes sumériennes jusqu’aux “alternative facts” et aux fake news, l’écriture sert à modeler la réalité plus qu’à la décrire. Faute de savoir raconter son impact, le design s’est vu dépossédé du “design thinking”, rebaptisé “product discovery” et porté par les PM. L’entreprise n’entend finalement que deux récits : créer de la valeur ou baisser les coûts. Sans narratif business clair, le design finit rangé dans la colonne “charges” et les coupes suivent
Ce que nous retenons
Le temps a peut-être manqué un peu et les liens sont tissés très rapidement, l’exercice réalisé est néanmoins intéressant, tout autant que les mises en perspectives faites. Quelles erreurs de l’Histoire ne pas réitérer, comment adopter une posture business pour mieux valoriser le rôle de designer, l’importance de la créativité et de la collaboration face à la place grandissante de l’IA dans tous les processus.
Cette vision pragmatique, et un peu moins catastrophiste que sur LinkedIn, d’un avenir possible de nos métiers, avec un storytelling séduisant, convoquant des éléments pluridisciplinaires (Histoire, sociologie et même poésie pour conclure), ça a un peu flatté le lobe académique de nos cerveaux. Et on aime tous ça être flatté, bien sûr.
FAMOUS : lessons learned from the most iconic (and maybe the most underrated) product of our time
Par Michael Baeyens

Avec un véritable talent de storytelling, de mise en scène et de conception de support, Michael nous embarque dans son voyage pour découvrir Taylor Swift. La réalisation est à la hauteur d’un documentaire télévisuel, le propos est maitrisé, c’est un spectacle. La veste à paillettes joue pleinement son rôle. On en ressort avec le sentiment d’avoir appris une multitude de choses sur Taylor Swift, c’est chouette pour échanger avec les Swifties de l’agence (il y en a !). Sur le moment, on se demande franchement le rapport avec la choucroute, et malgré tout le talent d’orateur développé (et il y en a à revendre), on imagine plein de leçons en matière de marketing, voire d’animation de communauté, donc peut-être des leçons pour une vision produit d’ensemble, en revanche en matière d’UX (parce que ça peut sembler audacieux, mais les UX days, c’est un peu la thématique), on n’a pas trop vu. Mais on avait sûrement trop de paillettes dans les yeux.
Ce que nous retenons
Sur la forme, énormément de choses, on rêverait de faire aussi beau, dynamique, coloré, séduisant. Sur le fond, on cherche un peu. On ne peut pas tout avoir après tout.
De la stratégie à l’exécution : découvrez les coulisses de la refonte du site de La Redoute
Par Renaud Dorizon et Justine Grave
Une refonte ambitieuse au service d’un repositionnement de marque
Avec la nouvelle signature de marque “vivre le beau”, la marque La Redoute se repositionne autour de la promesse de rendre le beau accessible aux familles. La refonte du site, déployée en avril 2024, s’inscrit dans cette dynamique.
Les coulisses de la refonte et ses enseignements
Justine Grave nous ouvre les coulisses de la refonte en détaillant les quatre phases-clé de l’opération. Pour chaque phase, nous identifions des enseignements concrets et actionnables.
- Brief et cadrage
Le brief initial, prévu pour deux semaines, s’étend finalement sur deux mois. Il devient une étape cruciale du projet, autant pour aligner toutes les parties prenantes que fixer des objectifs partagés via des objectifs et des résultats clés (S-OKR). L’équipe multiplie les ateliers avec les métiers pour coconstruire une vision claire.
Enseignement-clé : le travail d’alignement doit être progressif et itératif
- Processus et validation
Une “core team” est constituée pour piloter la phase d’exploration, avec un fort accent mis sur la confiance et la liberté créative. Justine insiste sur un message clé adressé aux parties prenantes : “laissez-nous faire de l’exploration pour ne pas vous retrouver avec la même chose que vous avez maintenant, juste avec des espacements et des radius différents”. Cette phrase bien envoyée résume une posture clé : impliquer les parties prenantes très tôt pour partager la responsabilité du résultat.
Enseignement-clé : en phase d’exploration, il faut toujours penser à sécuriser l’audace
- Design delivery
La phase de handover est prise au sérieux et bénéficie d’un temps dédié équivalent à la phase de design. Les designers accompagnent les développeurs pour garantir une bonne compréhension des composants, de leur usage et des intentions associées. L’objectif : préserver la cohérence du produit jusqu’à la mise en production.
Enseignement-clé : les passages de relais requièrent autant de soin que les phases de design
- Stratégie d’implémentation
La stratégie d’implémentation repose sur un plan partagé par toutes les équipes, intégrant des niveaux de priorité (must/should/could/won’t), des KPI, et un découpage fonctionnel. Afin de dérisquer, la démarche intègre des tests utilisateurs, des POC techniques et des AB tests. Chaque version majeure est systématiquement documentée (via des captures et des annotations) pour évaluer sa valeur ajoutée par rapport à la cible.
Enseignement-clé : tester tôt, prioriser finement, documenter toujours sont les piliers d’une feuille de route maîtrisée
Ce que nous retenons
Une conférence solide et bien structurée, qui illustre avec clarté l’envers d’un projet de refonte d’envergure. Elle nous rappelle que le succès d’un redesign repose autant sur la méthode que sur le rendu final. L’intervention met en lumière l’importance des “briques invisibles” (alignement stratégique, soin du handover, implication collective…) et parvient en peu de temps à transmettre des insights éclairants sur la manière dont la refonte a été pilotée.
Pour aller plus loin, quelques exemples d’arbitrages concrets ou de points de friction rencontrés en chemin auraient nourri notre curiosité, notamment pour mieux percevoir les effets des choix sur l’expérience utilisateur. Cela dit, au vu du format très court de la conférence, le résultat atteint reste pleinement satisfaisant. Une intervention précieuse pour tout designer ou product manager cherchant à mieux articuler stratégie, organisation et exécution.
Du Concept à l’Impact : comment le design infuse l’IA dans le produit
Par Gwendoline Sonzogni
L’intégration de l’IA, du concept à l’impact
La conférence présente le retour d’expérience de Gwendoline Sonzogni, Directrice design chez PayFit, sur la création de “Payfit Copilot”, assistant conversationnel IA conçu pour améliorer le service client et recentrer l’intervention humaine là où elle a le plus de valeur. Aujourd’hui, 70 % des clients l’utilisent, avec un taux d’escalade limité à 20 %.
- Vite, un MVP
Gwendoline revient sur la toute première étape du projet : en deux jours, un brouillon sous forme de modale est conçu pour aider les équipes PayFit à se projeter concrètement. Très vite, un POC est développé par une équipe hybride (design, tech, ops), dans une dynamique d’expérimentation. Elle partage le décalage assumé entre l’ambition initiale (concevoir un widget sur mesure, modulaire et entièrement intégré aux systèmes internes) et la réalité du MVP livré. Ce dernier est volontairement simple, sans interdépendances techniques, pour permettre un déploiement rapide.
- Une IA à la fois autonome et encadrée
L’équipe choisit la transparence (dire à l’utilisateur qu’il parle à une IA), priorise l’autonomie de l’IA, mais conserve la possibilité de bascule humaine si besoin. Un soin particulier est apporté à la crédibilité de l’assistant IA. Pour limiter les hallucinations, l’équipe intègre systématiquement l’instruction “si tu ne le sais pas, dis-le, n’invente pas la réponse”.
Côté UX, l’assistant s’intègre dans des points stratégiques (search bar, dashboard, widget). Côté UI, l’interface emprunte des codes connus de l’IA (violet, étoiles).
- Prototyper, observer, nourrir la roadmap
Le déploiement progressif s’accompagne d’un suivi fin : les escalades (tickets créés car l’utilisateur n’est pas satisfait par la réponse fournie par l’assistant) sont catégorisées par typologie de sujet (absences, fiches de paie…), remontées et transformées en données d’orientation produit. Aujourd’hui, le 20% des tickets ne sont pas créés car la première réponse de l’IA est suffisante.
Une “design week” interne, terrain de jeu collaboratif entre designers et métiers, permet en aval d’imaginer les futures fonctionnalités et les futurs cas d’usage dans chaque étape de la user journey.
- Un regard rétrospectif
Le projet a renforcé la place du content design, désormais au cœur de la valeur perçue. Il a aussi stimulé l’innovation au sein de l’équipe : retour en grâce de la créativité, “effet botox” selon les mots de Gwendoline, comme un rajeunissement des façons de faire, une vitesse d’exécution accrue, et un regain d’envie dans les équipes.
Ce que nous retenons
Une présentation pédagogique et vivante, portée par une oratrice claire et bien connectée à son sujet. La narration est fluide, le fil rouge bien tenu, et le recul affiché permet de dépasser l’effet “buzzword”de l’IA. Elle a le mérite, rare dans ce format, d’être riche en visualisations concrètes des interfaces et des outils internes, ce qui facilite l’appropriation des arbitrages et partis pris du design.
Au global, c’est une intervention riche d’enseignements pour quiconque cherche à infuser l’IA dans un produit, tout en jonglant avec des contraintes de temps, sans perdre de vue la cohérence et l’expérience utilisateur.