Le guerilla test (ou guerilla testing) consiste en une collecte de retours d’usagers dans un lieu public, généralement de passage. Son avantage réside dans un faible investissement budget-temps pour dégrossir la compréhension des usages et freins à l’usage. D’excellentes ressources et formations existent pour s’approprier cette méthode de récolte, abordant la préparation des questionnaires, le ciblage de l’échantillon, ou même les lieux stratégiques. Après avoir publié un premier article sur les astuces pour réussir vos guerilla tests, on vous propose aujourd’hui de les hacker !
Tout le monde s’accorde sur une difficulté majeure : essuyer de nombreux refus lorsqu’il est temps d’aborder les usagers pour les interviewer. Après tout, nous sommes tous ces usagers un peu pressés ou qui préfèrent siroter un café tranquillement.
Quelques astuces pour recruter des utilisateurs en guerilla test
Nous savons qu’il est frustrant d’essuyer des refus à longueur de journée en guerilla. C’est pourquoi nous souhaitions partager quelques astuces permettant d’augmenter les chances d’interviewer un usager dans un espace public. Les conseils donnés ici sont empiriques et n’engagent que nous. À aucun moment ils ne prétendent être d’une efficacité et d’une exemplarité absolues.
Voici donc quelques idées pour hacker les tests UX en guerilla, que vous pourrez tester lors de vos prochaines sessions.
N’hésitez pas à nous partager vos pratiques également !
Les conditions pour réussir un test guerilla ou un entretien urbain
La qualité du guerilla testing passe, entre autres, par un échantillon large et représentatif de la cible usagers. Lorsque les refus d’entretiens s’enchainent, il est normal de perdre le moral, de ne plus oser aborder les usagers. Et ne plus oser les aborder, c’est diminuer l’échantillon et parfois induire un biais de recrutement. On aura en effet tendance à cibler des profils plus faciles à aborder, et donc à collecter des retours sur un échantillon stéréotypé, etc.
C’est pourquoi il est important de dissocier les raisons personnelles des raisons contextuelles qui peuvent expliquer les refus.
Privilégiez des contextes favorables
On évitera donc d’interroger les personnes dans ces contextes pour minimiser les refus (sauf lorsque la mission porte sur ces usagers ou ces contextes !) :
- les personnes occupées activement : lecture de livre, discussions, recherche d’informations, restauration, achats en tout genre ;
- les personnes en mouvement : elles ont généralement un but vers lequel elle se dirige, une heure à respecter (sauf dans le cas de la flânerie);
- celles qui montrent des signes d’agacement ou de refus d’interactions sociales : personnes qui soupirent et tapent du pied, personnes isolées dans un coin de la gare, personnes qui baissent les yeux ou tournent la tête lorsque quand vous vous approchez, etc.
- les personnes qui vous ont vu conduire l’entretien auprès d’une autre personne : ils auront sûrement déjà préparé un motif de refus.
Une fois les contextes favorables aux refus évités, quelles astuces peuvent être déployées pour aborder les utilisateurs ?
Proposez des interactions rassurantes et engageantes
Comme souvent dans nos métiers, tout est question de parcours utilisateurs. Pour réussir vos guerilla tests, il vous faut bien les préparer. Focalisez-vous sur l’approche, le démarrage et la modération pendant l’échange avec l’utilisateur. On vous détaille tout ça de suite !
Bien approcher les utilisateurs potentiels lors de tests en guerilla
L’idée est d’éviter que la personne ciblée ait l’opportunité de construire un préjugé sur vos intentions avant que vous l’abordiez. C’est une des raisons pour lesquelles certaines personnes refusent d’emblée une interaction avec vous. Pour éviter ces préjugés, vous pouvez par exemple :
- Approcher la personne de côté : cela évite qu’elle construise ce préjugé en vous voyant arriver au loin ;
- Ranger les questionnaires dans le sac et ne pas porter de badge en bandoulière, éléments perçus comme dépréciateurs ;
- Si deux experts UX conduisent l’entretien, seul l’un d’eux se présente. L’autre reste en retrait jusqu’à ce que l’usager potentiel accepte de participer au questionnaire. Cela évite que l’utilisateur se sente pris au piège.
- Et sourire, bien sûr.
Donner envie aux utilisateurs de partager leurs expériences
Les premiers instants de l’interaction sont cruciaux, il s’agit de préparer les éléments verbaux qui vont rassurer :
- Préparer une phrase d’accroche très courte, dégainée systématiquement, qui rassure sur vos intentions et votre statut (« Bonjour, je travaille pour tel client sur tel sujet, est-ce que vous auriez quelques minutes à m’accorder pour me donner votre avis sur ce sujet s’il vous plaît ? »). Éviter à ce stade de décrire le projet, les raisons détaillées de l’entretien, le déroulé de l’entretien, erreurs que l’on produit par peur de ne pas être légitime (« Je travaille pour telle agence qui travaille pour tel client qui veut savoir comment ses utilisateurs utilisent son produit, et pour ça nous aimerions vous poser 6 questions. On abordera rapidement vos attentes, les freins que vous rencontrez, etc. »).
- Communiquer ensuite sur les éléments rassurants et engageants (“Les réponses sont anonymes, il n’y a pas de bonnes ou de mauvaises réponses, les réponses ne vous engagent en rien, vous êtes libres de quitter l’entretien lorsque bon vous semble sans avoir à vous justifier”).
- Lorsqu’ils existent, il est très intéressant d’entamer l’échange par les bénéfices à participer à l’entretien (“Que diriez-vous d’une boisson gratuite en échange de 5 min de votre temps ?”)
La personne a accepté de s’entretenir avec vous : super ! Mais ce n’est pas gagné pour autant, il faut encore assurer un entretien de qualité. Et il se peut que la personne en face de vous regrette déjà d’avoir dit oui. Dans ce cas, voici quelques conseils pour conduire la phase d’entretien.
Assurer la pertinence des retours et maximiser l’engagement en guerilla
Réponses courtes et sèches, difficultés à la faire verbaliser, regard fuyant… Il serait contre-productif d’essayer de maintenir l’engagement d’une personne qui montre des signes d’agacement. La qualité du peu de retours collectés ne sera pas à la hauteur de l’énergie dépensée. Il sera plus raisonnable d’écourter pour interroger une autre personne. Mais la situation inverse existe également, et parait parfois nous échapper :
- Ne pas hésiter à suivre (raisonnablement) les digressions de la personne interrogée : cela permet de maintenir son engagement, même si le temps d’entretien rallonge un peu. Le questionnaire sert de fil rouge, il est donc possible de recentrer l’entretien à n’importe quel moment avec des phrases du type « Ça n’a rien à voir, mais nous aurions aimé aussi avoir votre avis sur … » ; « Vous m’évoquez ceci, cela me fait penser que nous aimerions également savoir si… » ;
- Désamorcer rapidement les situations délicates avec des phrases clefs préparées en amont, sans donner d’avis personnel, et recentrer sur le questionnaire (« J’ai pris part de vos opinions sur ces questions éthiques, parlons à présent de … ») ;
- Éviter les entretiens avec plusieurs usagers en même temps (sauf si la mission le requière) : cela permet d’éviter les biais de conformité, et les débats dont il est difficile de ressortir un retour acté. Cela limite également les difficultés d’analyse lorsqu’il s’agit de croiser les critères de qualification de l’échantillon avec des retours.
Prêt à hacker les guerilla tests ?
Indiquez-nous si ces conseils vous ont aidé à augmenter vos chances d’entretien avec des utilisateurs en guerilla testing. De notre côté, on reste à l’écoute de tous vos bons conseils pour progresser. Lors du festival Raggae Sun Ska nous avons eu l’opportunité de mettre en oeuvre tous ces conseils. Si vous souhaitez en voir davantage, c’est par ici.